TRAVAUX EN LOGE 6016
AUGUSTE COMTE
12-XII-6016
Auguste COMTE - Père du Positivisme - Grand-Prêtre de la Religion de l’Humanité
Raymond Aron, dans ses « Etapes de la Pensée Sociologique », déclare :
« Pourquoi la conception d’Auguste Comte est-elle restée en dehors du grand courant de la philosophie de la société moderne ? La question mérite d’être posée. En un sens la doctrine d’Auguste Comte est aujourd’hui plus proche des doctrines à la mode que beaucoup d’autres doctrines du XIXe siècle. Toutes ces théories qui actuellement [...] tendent à dégager les traits fondamentaux de la civilisation industrielle pourraient se réclamer d’Auguste Comte. Il est le théoricien de la société industrielle, en deçà ou en marge des querelles entre libéraux et socialistes, entre doctrinaires du marché et apologistes du plan. »
Quel est donc Auguste Comte, si reconnu par certains et si méconnu par le plus grand nombre ?
Auguste Comte est né en 1798 à Montpellier, au sein d'une famille de petite bourgeoisie catholique ; Brillant élève en mathématiques, il est renvoyé en 1816 de l'Ecole Polytechnique pour insubordination et rébellion. Il enseigne alors les mathématiques.
En 1817, il rencontre Claude-Henri de Saint-Simon et devient son assistant. Le jeune Comte sera très influencé par la doctrine philosophique et sociale de Saint-Simon - l'industrialisme - qui sera bientôt présenté comme un « nouveau christianisme ». Comte participe de près à sa conception puisqu'ils rédigent ensemble les brochures signées par ce dernier. C'est d'ailleurs une querelle de signature qui va conduire à la brouille entre les deux hommes, puis à leur rupture définitive en 1824.
Comte se retrouve alors sans travail. Il cherche à obtenir une chaire d'université, mais l'Ecole polytechnique refuse d'offrir un poste à son ancien élève trop séditieux.
Il étudie Monge, Condorcet, Montesquieu. Confronté à des difficultés financières, il ouvre, à son domicile un cours de philosophie positive qui rencontre beaucoup de succès. De manière générale, l'intransigeance de ses positions lui vaudra des démêlés permanents avec les institutions et leurs représentants.
Sa rencontre avec Clotilde De Vaux, en 1844 et l'amour qu'il lui porte bouleversent sa vie. Elle devient son égérie, mais elle meurt en 1846.
Les dernières années de Comte sont celles d'une dérive de plus en plus forte vers un messianisme.
Comte se déclare « souverain pontife de l'Humanité ». Il écrit aux grands de ce monde - le tsar Nicolas, le grand vizir de l'Empire ottoman - pour les convertir au positivisme.
Il estime qu'avant 1860, il prêchera la religion positive à Notre-Dame !
En 1857, atteint d'un cancer de l'estomac, il meurt, entouré de ses disciples.
Il est inhumé au Père-Lachaise, accompagné une dernière fois par Proudhon et quelques rares fidèles.
En 1836, à 38 ans, Auguste Comte décide de concevoir une nouvelle philosophie et un projet social pour la société industrielle qu'il voit naître sous ses yeux.
Son projet est de concevoir une nouvelle science, qu'il entend nommer « physique sociale ». Le terme ayant déjà été utilisé par Adolphe Quetelet, Auguste Comte doit renoncer à son label.
Il baptisera sa science du nom de sociologie, néologisme construit à partir du latin socius (société) et du grec logos (savoir).
Cette science sera à l'organisme social ce que la physiologie est aux organismes vivants : un savoir scientifique d'où découlera une « thérapeutique ».
Dans cette nouvelle société, les princes et les militaires doivent laisser place aux producteurs. « Au gouvernement des hommes se substitue l'administration des choses », la formule sera reprise par Marx.
La science sociale sera l'auxiliaire de ce nouveau monde.
Le Cours de philosophie positive est un projet intellectuel de grande ampleur.
La première leçon du Cours présente la « loi des trois états » qui résume, selon Comte, le développement de la pensée humaine.
Dans son développement, la connaissance passe par trois âges :
L'âge théologique (ou fictif) est celui de l'enfance de l'humanité. L'esprit recherche la cause des phénomènes soit en attribuant aux objets des intentions (fétichisme), soit en supposant l'existence d'êtres surnaturels (religion polythéiste) ou d'un seul Dieu (monothéisme). « L'esprit humain se représente les phénomènes comme produits par l'action directe et continue d'agents surnaturels plus ou moins nombreux. » C'est le temps des croyances magiques, des fétiches, des esprits, des religions ; un monde où « les morts gouvernent les vivants ».
L'âge métaphysique (ou abstrait) est celui de l'adolescence de la pensée. Les agents surnaturels sont remplacés par des forces abstraites : la Nature de Spinoza, Le Dieu géomètre de Descartes, la Matière de Diderot, la Raison du siècle des Lumières. Cette époque marque un progrès par rapport à la pensée anthropomorphique antérieure. Mais la pensée reste prisonnière de concepts philosophiques abstraits et universels.
Enfin vient l'âge positif que Comte décrit comme « l'état viril de notre intelligence ». L'esprit positif rejette la recherche du « pourquoi ultime » des choses pour considérer les faits, « leurs lois effectives, c'est-à-dire leurs relations invariables de succession et de similitude ». Le recours aux faits, à l'expérimentation, à l'épreuve de la réalité est ce qui permet de sortir des discours spéculatifs. C'est le premier principe du positivisme. Alors que l'esprit métaphysique recourt à des concepts éternels et universels qu'il ne soumet pas à la réalité, l'esprit positif confronte les hypothèses au monde réel : « Tout est relatif, voilà la seule chose absolue », proclame Comte.
Ce dernier état recherche le "comment" des choses et non le "pourquoi", car la nature des choses, l'absolu, l'explication universelle de la nature sont des utopies qui relèvent de la métaphysique et ne doivent pas être recherchés.
L'approche scientifique permet de dévoiler le réel et de décrire les lois de la nature en vue d'une destination pratique, utile, pour l'action, par opposition à la connaissance pour la
connaissance.
Auguste Comte réalise un classement des différentes sciences et considère qu'il reste encore une science positive à fonder, la plus importante car elle a pour objet les faits humains et doit permettre le progrès de la société. Il la baptise "sociologie".
Auguste Comte détermine et hiérarchise ainsi six sciences fondamentales, chacune d'entre elles dépendant, pour son développement, de celle qui la précède :
Elles constituent le système général de connaissance que son "cours de philosophie positive" tente de coordonner.
L'esprit positif s'annonce comme l'avènement d'un nouvel âge de la pensée.
Dans la suite de son Cours, Comte propose une classification générale des sciences. Cette classification se fonde sur les degrés de complexité croissante des objets étudiés. L'astronomie et la physique étudient des objets inanimés. Leur méthode est abstraite et simple. La chimie et la biologie sont les sciences du vivant : elles ont affaire à des objets complexes et changeants. La science sociale est arrivée en dernier dans l'ordre des sciences. Elle doit intégrer les acquis des autres sciences pour affronter l'objet le plus complexe qui soit : la société humaine.
La physique sociale, rebaptisée sociologie, doit devenir à son tour une science positive.
Elle permettra de connaître à la fois les lois d'organisation de la société (statique sociale) et celle de son évolution (dynamique sociale).
Le long conflit entre l’immanence et la transcendance touche à son terme ; la transcendance, c’est la théologie ou la métaphysique, expliquant l’univers par des causes qui sont en dehors de lui ; l’immanence, c’est la science expliquant l’univers par des causes qui sont en lui.
L’humanité, dans son enfance et sa jeunesse, a été régie par les lois de la transcendance ; elle le sera, dans sa maturité, par les lois de l’immanence. Assurer l’ascendant de l’homme sur la nature, étendre son empire sur la planète et déterminer l’équité sociale, tel est son rôle.
Nul doute que l’humanité soit enfin parvenue à cet état au moment où Comte en prend conscience et se propose de l’expliquer à ses contemporains. À ses yeux, l’histoire est révolue.
Comment est-on passé d’un état à l’autre ? Sans doute par la tension qui pousse l’esprit humain à évoluer jusqu’à ce qu’il accède à une connaissance achevée. Cette tension est rupture, elle marque la liberté de l’esprit (c’est la liberté qui permet le progrès – seule référence de Comte à la liberté d’ailleurs). Mais cette liberté est-elle délibérée ? Comme Hegel, Comte estime que les forces de l’histoire échappent à la volonté humaine.
Avec la sociologie, Comte pense résoudre les problèmes sociaux.
Car son but est aussi de résoudre le problème de l'organisation sociale : « Savoir pour prévoir, prévoir pour pouvoir. »
Ainsi se termine le Cours de Philosophie positive.
Reste à mettre en œuvre ce projet. C'est alors que l'existence de Comte connaît un grand tournant.
En octobre 1844, se produit l'évènement capital de sa vie : il rencontre Clotilde de Vaux. La mort de Clotilde, en 1846, bouleverse Comte.
Il voue un culte à Clotilde, devenue la patronne du positivisme.
C'est à cette époque que commence sa "seconde carrière".
Le Cours s'adressait à l'intelligence et visait une réorganisation mentale de l'humanité.
Désormais Comte s'attache à la réorganisation "morale".
Sa philosophie évolue vers une "religion de l'humanité" à laquelle il se consacrera jusqu'à sa mort.
C'est le but que vise le Système de philosophie positive ou traité de sociologie instituant la religion de l'humanité.
La religion n’échappe pas aux appétits de la science, et comme dit le Traité de Sociologie, la sociologie, doit « instituer la religion de l’Humanité ».
Ainsi les œuvres de la fin de la vie de Comte doivent toutes leur inspiration à ce thème apparemment nouveau : la religion de l'Humanité.
On a souvent souligné les différences qui existent entre les œuvres du début et celles de la fin, l'attribuant soit à l'importance que prirent pour Comte les thèmes religieux après son amour pour Clotilde de Vaux, soit, plus simplement, à une systématisation d'idées bizarres et délirantes.
L'exigence positive n'est pas une exigence de méthode, elle n'a de sens que dans la mesure où elle prépare la réforme du réel, et du seul réel positif :
L'Humanité, c'est-à-dire « l'ensemble des êtres passés, présents et futurs qui concourent librement à perfectionner l'ordre universel »
C'est sans doute dans cette assimilation, cette identification entre le réel et l'universel, le positif et le religieux, que réside toute l'ambiguïté, mais aussi tout le sens de la pensée de Comte : la réforme du réel ne peut s'achever que dans la religion de l'Humanité, parce que c'est là que s'affirme de la façon la plus forte la primauté du spirituel.
Le thème religieux est en fait constant, car, finalement, seul l'esprit représente le vrai positif.
A la morale, septième science, science finale et sacrée, reviendra le privilège de fonder le nouvel ordre spirituel, d'assurer l'intégration de l'individu dans le réel positif et de promouvoir le culte de l'humanité
Et Comte de se mettre en peine d’imaginer et de réglementer cette nouvelle religion, avec ses rites, ses textes, ses cérémonies, sa mère protectrice, et ses temples.
La « religion de l'humanité » de Comte, telle qu'il la désigne, s'appuie sur trois notions :
Devenue essentiellement religieuse, la doctrine comtienne est exposée dans le Catéchisme positiviste (1852) et la Synthèse subjective du système universel des conceptions propres à l'état normal de la société, ouvrage que la mort de l'auteur, le 5 septembre 1857, laisse inachevé.
Dans le catéchisme positiviste, Auguste Comte est allé jusqu'à formaliser sa religion en définissant un calendrier liturgique et neuf « sacrements » :
L'Incorporation est l'union avec les morts, censés gouverner le monde
La religion étant à l’âme ce que la santé est au corps, il fallait s’attendre à ce que le positivisme religieux proteste contre le « déplorable morcellement » qui répartit l’homme « entre les médecins qui n’étudient que le corps, les philosophes qui croient étudier l’esprit, et les prêtres qui surtout étudient le cœur » et demande « la réintégration normale d’un tel service [la médecine] à l’office sacerdotal, d’où il se détacha jadis ».
Dans sa fonction régulatrice, le sacerdoce doit contenir ou redresser les abus de gouvernement, ce qui suppose sa pleine indépendance et rend donc nécessaire la séparation de l’Église et de l’État.
L’Église apparaît d’abord comme un des trois modes d’associations possibles, avec la famille et la cité. De même que la société politique se superpose à la société domestique, la société religieuse se superpose à la société politique. Comte, qui était un partisan résolu de la décentralisation du pouvoir temporel, oppose ici le politique et le religieux comme le local au global. L’Église se caractérise donc par la pleine universalité ; elle est catholique au sens étymologique du terme : parlant au nom de l’Humanité tout entière, elle ne saurait être enfermée dans aucune frontière étatique.
Le positivisme « religieux », proprement dit, a aujourd'hui pratiquement disparu en tant que mouvement « religieux ».
Il subsiste néanmoins une chapelle à Paris et une Église positiviste au Brésil.
La religion de l’Humanité méritait mieux que cette fin de non-recevoir.
Raymond Aron, pourtant peu suspect de sympathie pour le positivisme, remarquait :
« De toutes les religions sociologiques, la sociocratie d’Auguste Comte me paraît philosophiquement la meilleure. Peut-être, d’ailleurs, est-ce la raison pour laquelle elle a été politiquement la plus faible. »
Même si l’on se refuse à le suivre dans sa réponse, on ne peut lui nier le mérite d’avoir vu la nécessité de poser la question : quelle religion après la mort de Dieu ? Il y a un peu plus de cent ans, c’est le positivisme religieux qui nous a permis de penser, puis de mettre en place, la laïcité.
Aujourd’hui où notre société s’inquiète devant la montée des fanatismes religieux, où elle se demande comment parler de religion à l’école, le moment est peut-être venu de prendre un peu plus au sérieux l’enseignement du Système de politique positive, ou traité de sociologie instituant la Religion de l’Humanité, car il n’est pas exclu qu’il puisse nous aider à résoudre certains des problèmes auxquels nous sommes confrontés.
LA TABLE D'EMERAUDE
10-X-6016
La Table d'Émeraude constitue le plus court résumé, sinon le plus clair, du Grand OEuvre alchimique.
Hermès Trismégiste, Hermès le « trois fois grand », qui se désigne à la fin du texte de la Table comme son auteur, tantôt considéré comme un sage, un adepte de la Gnose qui aurait vécu peut-être au IIème siècle avant J.C., tantôt comme le dieu lui-même, apparait dans le panthéon égyptien en tant que premier ministre ou descendant du Dieu Thot.
Dieu lunaire, qui sera assimilé par les Grecs, vers le IVème siècle avant J.C., au Logos, c'est à dire au Verbe.
Dont voici le texte :
Vrai sans mensonge, certain et très vrai. Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut. Et ce qui est en haut est comme ce qui en bas, pour réaliser les miracles d'une seule chose.
Et de même toutes choses procèdent d'une seule, par la médiation d'une seule. Ainsi toutes choses naquirent de cette chose unique, par adaptation.
Son père est le Soleil, sa mère la Lune. Le vent l'a porté en son sein. La terre est sa nourrice.
Voici le père de tout le telesme du monde entier. Sa force est entière, si elle est transformée dans la terre. Tu sépareras la terre du feu, le subtil du grossier, doucement, avec grande ingéniosité.
Il monte de la terre au ciel, et redescend en terre, et reçoit la force des choses d'en haut et de celles d'en bas. Ainsi, tu auras la gloire du monde entier. Et c'est pourquoi toute l'obscurité te fuira. Voici l'énergie forte de toutes les énergies, qui vaincra toutes choses subtiles et pénétrera toutes choses solides.
Ainsi fut créé le monde. Voici que seront des adaptations admirables, dont voici la manière.
C'est pourquoi je m'appelle Hermès le Trois Fois Grand, possesseur des trois parties de la philosophie du monde entier. Ce que j'ai dit de l'opération du Soleil est terminé.
Si le texte laisse entrevoir, de façon presqu’occasionnelle, des opérations pouvant être qualifiées (à la rigueur…) de chimiques, l’ensemble n’en fait pas moins allusion à une philosophie novatrice débouchant sur une problématique du monde abordée différemment et plus particulièrement sur une interaction permanente entre le cosmos et la terre.
Sa finalité tend à démontrer l’unicité de l’univers soumis à des lois communes à tous les niveaux.
En dehors de l’esprit universel caractérisant la Table d’Emeraude, elle fournit une explication sur l’homme et le cosmos, permettant d’envisager la nature et les étapes de la démarche initiatique dont l’homme, à la fois Ouvrier, Matière Première, Outil et OEuvre en cours de réalisation, se présente comme un acteur dans le théâtre que constitue l’univers.
A première vue, s’établit entre l’homme et le Cosmos une distance incommensurable qui réduit le premier à une quantité négligeable du second et le condamne à une impuissante fragilité. Cependant, placé au milieu de l’indéfiniment grand et de l’indéfiniment petit, l’homme, sensible au mystère lié à ce qui le dépasse, s’interroge et devient capable de percevoir la dimension du Sacré.
De plus et surtout, il possède, au moins potentiellement, une faculté d’ordre universel qui transcende son individualité corporelle et alchimique et qui lui confère la capacité de découvrir la cause derrière l’effet, l’implicite sous l’explicite, l’intelligible manifesté par le sensible.
Poussé par un pressentiment ou une réminiscence, lorsqu’il frappe à la porte du Temple, le profane, dont la seule certitude qu’il avait jusque-là était d’être dans le doute*, a déjà l’intuition que l’univers forme un Tout ordonné et hiérarchisé, harmonieusement régi par des lois immuables à l’origine desquelles préside un Principe Unique.
En loge, l’espace s’étend de l’Orient à l’Occident, du Septentrion au Midi et du Zénith au Nadir. Devant nous, à l’Orient, nous voyons le soleil et la lune. Ce qui est en bas devient comme ce qui est en haut.
Lorsque nous sommes placés à l’ordre, nous pouvons comprendre que nous participons de la structure ternaire de l’univers : par l’orientation de nos pieds, nous appartenons au monde matériel ; par la rondeur de notre voûte crânienne, au monde spirituel ; par le reste de notre personne, au monde intermédiaire ou psychique. Ainsi constituons-nous un petit monde, un microcosme, dont le corps, l’âme et l’esprit ont leur correspondance respective dans les trois niveaux du macrocosme.
L’initiation apparaît dès lors comme la création du monde, consistant en la mise en ordre d’un chaos.
D’abord, dans sa relation au monde, l’homme a ressenti l’égrégore de forces contraires et unies.
* Hommage à Pierre Desproges
Ensuite, à l’intérieur de lui-même, il a fait l’expérience de la multiplicité de son être avec sa part d’ombre faite de pulsions et d’émotions.
Il se multiplie également en présence de l’autre. Le dessinateur Philippe Geluck, auteur des bandes dessinées « le chat », a une très belle phrase en ce sens : « Quand quelqu’un partage mon opinion, j’ai l’impression de n’avoir plus qu’une demi-opinion ».
L’être a pourtant, de tout temps, perçu une unité fondamentale, particulièrement dans la manifestation du cosmos. Le parcours du soleil, le rythme des saisons et la chaîne même de la vie, où toute mort fournit le germe d’un renouveau, donne l’intuition de régularité et de complétude, d’un rapport secret entre le rythme de l’âme et de celui de l’univers, de ce qu’on peut appeler un « ordre ».
« Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas pour accomplir le miracle de l’unité », confirme la Table d’Emeraude d’Hermès Trismégiste, le trois fois grand.
Les Constitutions d’Anderson contiennent aussi cette phrase : « La FM est destinée à rassembler ceux qui, sans elle, ne se seraient jamais rencontrés ».
De cette conscience découle, d’une part, la pratique du symbolisme, qui fait de toute chose l’expression d’une vérité analogiquement supérieure, et d’autre part, l’assurance que la connaissance de soi amène à la connaissance des autres et de l’univers, et celle-ci à la Connaissance du Principe Unique.
Dès lors, l’homme ne se trouve plus seulement dans le cosmos, mais le cosmos se trouve dans l’homme, et tous deux obéissent également à une Loi Universelle. En travaillant nous coopérons à l’exécution du Grand OEuvre selon le Plan du Grand Architecte de l’Univers.
Il s’en suit que la démarche initiatique passe par la connaissance de cette Loi Universelle puisque celle-ci ne fait que refléter la Volonté du Grand Architecte, en tant qu’organisateur du Chaos et source de l’Ordre et de l’Harmonie de l'Univers, et parce que l’initié, grandissant en sagesse, comprend que la liberté a pour condition la participation à l’Ordre Universel.
Mais cela nécessite de nous affranchir des limitations propres à l’existence individuelle, par la reconnaissance en nous du Soi immanent et de son identité avec le Principe Unique.
Cette Union au Principe délivre du carcan existentiel et correspond à une autre naissance, celle qui marque le passage de l’ordre psychique à l’ordre spirituel. Libération des déterminations et des servitudes du monde, elle se produit au centre de nous-même, dans la caverne du Coeur où s’opère la fusion de l’individuel avec l’universel.